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28 octobre 2015 3 28 /10 /octobre /2015 16:55

   En 2014, j'avais calculé que j'aurais pu gagner 2750$ si j'avais fait mes courses longue distance en élite plutôt qu'en amateur. Cependant en 2015, signe d'un niveau qui s'élève très vite en longue distance, je n'ai gagné que 500$ en prime de course, et uniquement sur des courtes distances au Québec. Cependant, je savais dès le printemps que ma situation financière allait changer en septembre, puisque j'allais changer de grade, passant d'étudiant au master à étudiant au doctorat. Ainsi, pendant l'été je décidais de dépenser mes économies dans un beau triathlon de fin de saison exotique. Initialement, j'avais choisi de faire IronMan Arizona afin de me lancer dans la grande aventure. Mais cela impliquait une préparation dès le mois d'août, chose risquée sachant que mon nouvel emploi du temps de septembre allait peut être géner mes entrainements. Avant de se lancer dans l'IronMan, il est important d'avoir trouvé un équilibre dans sa vie, j'ai donc remis l'idée à plus tard, pour plutôt prendre le départ d'un dernier 70.3. J'avais 4 possibilités : Los Cabos (Mexique), Las Vegas, Austin ou Miami (USA). Las Vegas n'était pas commode car la course était loin de l'aéroport, Los Cabos trop compliqué pour faire l'aller-retour sur le weekend avec les changements de vols. Austin et Miami présentaient des courses accessibles en transport en commun depuis l'aéroport, avec des AirBnB pas cher aux alentours. En regardant les plateaux d'athlètes des années précédentes, j'ai finalement choisi Miami, car j'étais certain d'y voir des stars, et je n'ai pas été déçu (Raelert, Starykowicz, Dye, Reid, Dreitz, Albert, Costes, ...). J'ai donc pris un vol pour Miami (aller-retour sur le weekend) et un AirBnB devant la course pas cher (une sorte de dortoir à 4 par chambre, heureusement avec des partenaires de chambre respectueux et silencieux).

   Bien que ce voyage était un gros investissement financier, je n'ai eu aucune pression particulière avant ma course vis-à-vis d'une éventuelle contre-performance ou bris mécanique. C'était mon premier gros voyage pour une course, et j'éprouvais une fierté de m'y être rendu : J'avais obtenu seul, sans avoir jamais eu d'entraineur, par mes entrainements de ces dernières années, le niveau pour obtenir ma licence élite afin de prendre part à cette course en tant que pro, et j'avais financé complètement seul ce voyage. Une chose que je n'aurais jamais pensé pouvoir faire il y a 4 ans quand j'ai commencé le triathlon. Arriver à cette course représentait udéjà une petite victoire, et tout ce qui pouvait arriver le dimanche, c'était du bonus. Pour paraphraser Lionel Sanders à Kona, peu importe ce que la journée de dimanche allait m'offrir, je l'accepterai volontier.

   6 semaines s'étaient écoulées depuis ma mauvaise performance au championnat canadien. J'avais raisonnablement pris une dizaine de jours de repos avant de commencer une augmentation progressive du volume. La météo ayant été de mon côté (100% du vélo fait à l'extérieur), j'avais pu faire deux très grosses semaines, où je me sentais en grande forme. J'avais poussé mon corps à la limite de la blessure, et la semaine de repos pré-course avait tout réparé : J'étais 100% entrainé, 100% reposé. Du côté du matériel, j'ai appris que même la part de hasard peut être relativement maitrisée en ne négligeant pas le matériel : Sur deux 70.3 au mois d'août, j'avais eu deux crevaisons, et en effet, j'étais devenu feignant quant à l'entretien du vélo et le transport du nécessaire pour réparer. Cette fois, j'avais rajouté un porte guidon sur mon vélo pour y glisser chambre à air, cartouche de CO2, produit réparant, boyau. J'avais réglé les petits problèmes de mon vélo (remplacement du boitier de pédalier, recentrage de la roue arrière et des freins,...). J'avais vraiment eu l'impression d'avoir approché cette course comme un vrai professionel, restait toutefois la livraison de la performance. J'avais calculé pouvoir me rapprocher du 4h sur le parcours facile de Miami si je réitérais ma performance de Mont Tremblant (nage sans wetsuit en 28', vélo en 2h12', course en 1h20' + les transitions).

   Cependant, dans mon apprentissage, j'ai eu une nouvelle leçon. Je me suis toujours cru résistant à la chaleur, car j'ai toujours été capable de courir vite cette année dans la très grosse chaleur (comme le 1h22 à Challenge Maine). En fait, j'ai découvert que je suis résistant à la chaleur lorsque je suis acclimaté. Rien que le fait de gonfler mes pneus la veille m'a fait tremper mon T-shirt. Marcher me faisait terriblement suer, alors que les policiers n'avait aucun problème à rester en plein soleil avec leur veste en cuir. Si 30 secondes d'effort pour gonfler mon vélo était à ce point incommodant, je me demandais ce qu'il adviendrait d'un 70.3 dans cette température, mais je m'imaginais tenir le rythme tout en suant des litres, comme je l'avais fait cet été. Ne pas arriver 30h avant le départ mais plus tôt est la seule chose que j'aurais vraiment pu améliorer, si j'en avait eu la possibilité, je n'ai donc au final aucun regret sur ce plan là. Je saurais dorénavant qu'il faut adapter ses objectifs lorsqu'on fait une course chaude en début/fin de saison, quitte à courser pour le plaisir plutôt que la performance.

   Le matin de la course, le luxe bien trop rare de séjourner proche du départ, m'a permis de prendre un bon petit déjeuner après une nuit complète. La veille, les organisateurs nous avaient prévenus d'un risque d'annulation de la nage à cause de courant, mais la nage aura finalement bien lieu avec un problème tout autre. Le départ s'est fait dans le port de Miami, dans une soupe de déchets plastiques qui ne donnait pas envie de boire la tasse. Une fois le départ donné, je pose la main sur une masse gluante qui me laisse une sorte de bave sur les doigts pendant quelques mètres. L'incident se répète et bien que les bénévoles nous avaient assurer qu'ils n'avaient jamais vu de méduses à cet endroit dans l'histoire de la course, il va falloir se faire à l'idée d'un slalom. Je me rends compte que parfois elles piquent, parfois non. Je touche parfois des grosses comme des ballons de foot, parfois des petites, mais l'eau trouble empèche d'anticiper, et je les sens assez souvent me froler le visage ou le corps. Au final, je me ferais piquer 6 fois, dont une dernière très douloureuse à l'avant bras qui me fera hurler dans l'eau et me laissera une belle plaque rouge en cadeau. Mais au final les plus à plaindre seront ces petites bestioles transparentes qui ont dû se demander pourquoi 3000 types avaient décidé cette journée-là de leur passer sur le corps, surtout qu'elles ne nous auront pas vraiment ralenti. J'ai nagé la première moitié confortablement dans les pieds d'un athlète, pour ensuite accélérer sur la deuxième moitié. A la sortie, j'ai été très étonné de voir un 26 minutes à ma montre sur une nage sans wetsuit (j'avais tout de même enfilé le speedsuit Zoot pour maximiser mes chances de faire un bon temps), mais c'était mon 4ème triathlon en eau salée, et mon 4ème temps de nage canon, je commence donc à croire que l'eau salée a une influence flagrante sur la flottaison et la vitesse. Une fois sorti, je perds malheureusement quelques secondes à me faire passer du vinaigre blanc sur mes piqûres, et passe sur le tapis en 27 minutes, avec le recul, je m'en serais bien passé.

   Le parcours vélo a été un véritable régal; Une longue ligne droite traversant Miami suivi de deux autres sur l'autoroute jonchée de palmiers, jusqu'aux frontières du parc des Everglades, plat comme un billard. Pour l'occasion, j'avais adapté les roues avec une Falcon Rampage à l'avant (88mm), et la "grosse Bertha" à l'arrière (disque). Une fois sorti de Miami, j'ai commencé à rouler à 44-46km/h sans forcer, faisant monter la moyenne à 42km/h au demi-tour (1h04 sur le premier 45km) et j'ai eu la courte illusion d'une journée de forme incroyable. En effet, une fois le demi-tour effectué, un gros vent de face m'a ramené à la réalité et m'a fait payer cher ma naïveté, et j'ai vraiment poussé de toutes mes forces sur le retour pour ne faire que du 36km/h de moyenne. J'ai brisé de justesse le 2h20, déçu d'être aussi loin que ce que j'espérais, mais avec le recul, je n'ai pas tant progressé que ça sur le vélo cette année, et 2h19 c'est juste ce que je valais, peut-être proche de 2h15 une journée sans vent, mais pas mieux, puisque les autres pros ont sorti des temps comparables aux années précédentes malgré le vent. Ceci dit, il se pourrait qu'ils se soient fourvoyés à vouloir suivre le rythme infernal de Starykowicz à vélo (1h56), le payant par la suite à pied, les temps de course à pied n'ayant rien d'incroyable.

   Pour ma part, je croyais en la possibilité d'un temps rapide sur le parcours plat le bord de l'eau. J'avais couru 1h21 dans des conditions correctes (Mont Tremblant et Pays d'Aix) et 1h22-23 dans la canicule (Muskoka et Challenge Maine), ou même 1h25 en état de grosse fatigue (Championnat canadien). Mais comme énoncé plus haut, j'étais acclimaté. A Miami, dès le premier kilomètre, j'ai été pris de vertiges tant le soleil combiné à la chaleur reflétée par le goudron était inconfortable. Je n'ai eu aucun mal à oublier le chrono pour passer en mode survie et trouver une stratégie pour finir la course coûte que coûte. Elle a d'abord été de se tremper intégralement à chaque ravitaillement, puis une autre méthode plus efficace a été de se remplir les vêtements de glaçons. Ma non-résistance à la chaleur était flagrante, car ce n'étaient ni les verres d'eau (j'avais bu quatre gourdes sur le vélo et était très bien hydraté), ni les gels qui me faisaient courir vite, mais uniquement la présence de glaçons dans les vêtements. J'avais deux vitesses, la "vitesse glaçon", un peu en dessous de 4'/km, et celle "sans glaçon" qui était surement vers 5'/km. Cette stratégie a été assez payante puisque que j'ai maintenu une allure moyenne d'environ 4'10''/km avant de bien ralentir sur les derniers kilomètres, pour d'autres raisons comme la déshydratation où le manque d'énergie. Ca ne m'a pas vraiment dérangé, car le chrono espéré s'étant envolé, je n'était plus vraiment dans la course. j'ai même fait quelques kilomètres pieds nus car j'avais un échauffement très douloureux sur le bord du pied droit, jusqu'à ce que je me rende compte que verser un verre d'eau rendait finalement la douleur supportable et était plus pratique que de courir avec ses godasses dans les mains. Bref, peut être à cause de la chaleur qui a grillé les quelques neurones encore opérationels à ce moment de la course, c'était un peu le cirque sur la fin. Mais en franchissant la ligne, j'ai été loin d'être déçu, et même très heureux, car je m'imaginais que tout le monde avaient été incommodé par les conditions de vent et de chaleur, et que cela se verrait sur les résultats. ce n'est que plus tard, lorsque j'ai vu que les temps globaux des meilleurs pros étaient très similaires aux autres années que j'ai réalisé que cette chaleur n'avait rien d'incroyable, ça venait juste de moi. Ca a donc été un peu les montagnes russes : J'ai été très content d'avoir fini vivant la course, puis assez déçu d'être si loin au classement (battu par 9 pros féminines et groupe d'âge, chose dont je m'étais arrangé que ça n'arrive pas sur mes derniers 70.3), puis à nouveau très content car après analyse, mes temps de nage et de vélo sont représentatifs de mon niveau actuel, et concernant la course, je me demande comment j'ai pu ne courir qu'en 1h31 (mon temps le plus lent depuis 2 ans et demi) en ayant l'impression de m'arrêter presque un quart d'heure à chaque ravitailement pour se remplir le slip de glaçons.

   Finalement, très dur donc de repartir de Miami avec des mauvais souvenirs, mais facile de retenir la leçon : Adapter ses objectifs à la météo !

 

IRONMAN 70.3 MIAMI - 1,9KM+90KM+21,1KM

4h21'17''

Nage : 27'12'' (1'25''/100m, 101ème temps)

Transition 1 : 2'20''

Vélo : 2h19'27'' (38,724km/h, 32ème temps)

Transition 2 : 0'53''

Course : 1h31'25'' (13,849km/h, 4'19''/km, 34ème temps)

29ème sur 2505 partants

20ème pro.

Les photos ici.

 

Tellement satisfait d'avoir franchi cette ligne d'arrivée au 70.3 Miami ! Comment ne pas l'être ? Je me suis entrainé à...

Posted by Sacha Cavelier Triathlete on Sunday, October 25, 2015

 

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  • : Sacha Cavelier Triathlète
  • : Après une formation d'ingénieur en France ou je découvre le trail et l'ultra, je combine le triathlon élite à un doctorat de 2015 à 2020 au Canada. Maintenant papa et jeune chercheur universitaire, je suis modestement retourné a mes premiers amours, dans le mid-west américain quelques temps et maintenant en Australie. Ce blog raconte 15 années de vie sportive.
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